Présentation

La culture liquide est une méthode d'inoculation très efficace, applicable à la plupart des champignons. L'inoculation est propre, rapide, et la reprise l'est tout autant. Cette méthode permet de transformer une boîte de Petri en plus de 50 L de mycélium. À petite échelle, on peut utiliser uniquement des cultures de première génération (G1), limitant les manipulations, le délai de croissance végétative et les risques de contaminations associés. C'est une méthode incontournable, plus efficace que le classique grain-to-grain. Il faut cependant travailler dans une propreté impeccable (hotte à flux laminaire). Le désavantage est qu'un seul contaminant dans le liquide équivaut à toute une série de pots à jeter.

Matériel

  • Autoclave
  • Balance
  • Boîtes de Petri
  • Scalpel
  • Torche au propane
  • Plaque magnétique rotative
  • Barre magnétique
  • Erlenmeyer 1000ml adapté
  • Mélangeur (3 alternatives);
    1. Mélangeur en stainless Eberbach™, avec base Waring™: Excellent, durable, mais prix prohibitif.
    2. Base de mélangeur montée sur un pot mason: Économique, mais risque de fondre lors de l'autoclavage.
    3. Morceaux de verre cassés, dans un pot mason: Gratuit, mais efficacité douteuse, risques de blessures…

Préparation

Intrants

  • Gélose
  • Extrait de malt
  • Substrat final (paille, bois…)
  • Levures sèches
  • Gypse

Procédure

Il faut d'abord inoculer 2 à 3 boîtes de Petri. Lorsque le mycélium atteint 1 cm du bord, sélectionnez la boîte qui vous semble la plus saine et écartez les autres. C'est la seule que vous utiliserez. Préparez ensuite votre solution :

Pour formuler efficacement vos préparations, consultez le calculateur de recettes.

[Pour chaque boîte],1)

  1. Ajoutez 200 ml d'eau dans le mélangeur.
  2. Dans l'erlenmeyer, ajoutez la barre magnétique, 600ml d'eau, 24 g d'extrait de malt, 2.4 g de sciure ou de paille, 1.2 g de levure et 0.6 g de gypse (facultatif).
  3. Une fois que tous les ingrédients sont dissous, vissez fermement le bouchon sur l'erlenmeyer, puis placez-le avec le mélangeur dans le stérilisateur. Couvrez avec une serviette, et stérilisez à 15 psi pendant 45 minutes.
  4. Arrêtez le feu et attendez que la pression atteigne 1 psi. Relâcher le reste de la pression devant la hotte, ouvrez le stérilisateur et laissez refroidir les deux contenants directement devant le filtre HEPA. Une serviette placée au préalable peut agir comme bouclier, au cas où vous devez déplacer le contenant interne de l'autoclave jusqu'à la hotte.

Préparation de l'inoculum

Le mycélium de la boîte de Petri est d'abord pulvérisé en petits amas de cellules (mélangeur). La solution d'eau et de mycélium est ensuite incorporée dans une solution nutritive (erlenmeyer). La fermentation leur permettra d'amorcer leur croissance et de se restructurer en milliers de vigoureuses colonies. Lorsqu'elles seront versées dans le substrat, chacune de ces colonies deviendra un point d'inoculation. Il faudra utiliser ce liquide rapidement (48-96 h), sans quoi la fusion sera trop avancée et la reprise sera ralentie.

Pour permettre au mycélium de respirer durant la fermentation, et d'empêcher la sédimentation, il faut placer la solution sur un agitateur magnétique à 200 rpm, dans un contenant muni d'un filtre à air. Vous pouvez augmenter la vitesse si vous le souhaitez, mais une agitation lente permet aux cellules de fusionner et d'assurer une meilleure reprise sur le prochain substrat. Si l'agitation est trop rapide, le mycélium ne pourra pas se restructurer.

Une autre méthode consiste à verser la solution d'eau et de mycélium pulvérisé directement sur le substrat, sans fermentation. C'est un raccourci à la fermentation, mais son usage est limité à des volumes restreints.

  1. Avec le maximum de précaution, utilisez le scalpel, stérilisé à la torche, pour découper 4 morceaux de mycélium dans la boîte de Petri. Essayez de ne pas toucher le 1 cm de gélose vierge (au bord de la boîte), car cette partie est susceptible de renfermer des contaminants invisibles. Vous devez donc tracer un cercle autour de la marge du mycélium, et faire une croix pour séparer le cercle en 4 quadrants.
  2. Placez chacun de ces quadrants dans le mélangeur et replacez le couvercle. Allumez le mélangeur pendant 3 secondes, laissez reposer 5 secondes, 3 fois. Le mycélium est maintenant bien pulvérisé. Toujours devant la hotte, versez ce liquide dans votre solution nutritive. Refermez le couvercle et placez l'erlenmeyer sur la plaque rotative.
  3. Laissez incuber pendant 2 à 4 jours. Le mycélium pulvérisé aura tout juste le temps récupérer, et formera des milliers de colonies individuelles, représentant autant de points d'inoculation. Il est important de ne pas faire incuber trop longtemps votre solution, car les colonies vont fusionner et perdre en vigueur ainsi qu'en surface de contact.

Inoculation & Incubation

  1. C'est le moment d'utiliser l'inoculum. Par groupe de 4, dévissez les couvercles (sans les soulever) et placez les pots dans la hotte à flux laminaire.
  2. Installez-vous devant la hotte et retirez le bouchon de l'erlenmeyer. Au fur et à mesure, ouvrez un pot de substrat stérilisé et versez-y environ 15 à 25 ml de solution. Replacez l'inoculum près du filtre HEPA (sans couvercle), refermez bien le pot, puis secouez-le légèrement, en évitant que le grain n'entre en contact avec le couvercle.
  3. Conserver les pots à l'abri de la lumière. Après environ 7 jours à 24ºC, ou lorsque la colonisation atteint 50%, frappez les pots un à un, contre un pneu de voiture préalablement nettoyé et soutenu par un support.
  4. 11 à 14 jours plus tard, les pots devraient être complètement colonisés. Vous pouvez alors les frapper à nouveau contre le pneu pour bien morceler le mycélium. Il est ensuite prêt à inoculer un nouveau substrat, ou directement pour la fleuraison.

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Si les pots ont été cognés, cela risque d'affaiblir le verre en un ou plusieurs points. Ces fissures peuvent passer inaperçues, mais elles se dévoileront certainement au moment de casser le mycélium avec le pneu. Les éclats de verre peuvent causer des blessures graves, utilisez l'équipement de sécurité approprié (lunettes, gants de boucher, etc.).

Adaptation d'un erlenmeyer pour la culture liquide

Le mycélium à besoin de respirer. Afin de favoriser l'entrée de l'oxygène et de libérer le C02, la solution doit être constamment agitée pendant la phase d'incubation. Dans la littérature, il est conseillé de boucher l'ouverture de l'erlenmeyer avec du coton non absorbant recouvert de papier d'aluminium. Cette méthode fonctionne, mais rend la manipulation plus délicate. De plus, il faut fréquemment remplacer le coton et l'aluminium. À petite échelle, il est plus pratique d'utiliser un erlenmeyer en polymethylpentene (PMP) avec un bouchon adapté.

Pour ce faire, percez le couvercle à l'aide d'une tête de clou chauffé à la torche. Découpez ensuite un filtre micron pour que son diamètre se loge parfaitement sous la surface du bouchon (5 cm). À peu de frais, vous obtenez ainsi un erlenmeyer durable et parfaitement adapté à la culture liquide. Avant la stérilisation, le bouchon peut être nettoyé, au besoin, en le trempant quelques minutes dans une solution d'eau de javel 5 %. Ce n'est pas nécessaire de le séparer du filtre, car le PMP résiste à l'hypochlorite de sodium. Avec un bouchon de rechange ou du papier d'aluminium, vous pouvez utiliser ce même erlenmeyer pour stériliser de la gélose.